JOURNAL DU CONFINEMENT : ADIEU SOUTIF ET MAQUILLAGE

La situation d’urgence nous permet aussi de s’affranchir de carcans vestimentaires. Soutien-gorges, fringues serrées et mascara en prime.

Ça fait une semaine qu’on est confiné.e.s : c’est l’heure du bilan. D’abord, légère remise en contexte. Depuis le 17 mars à midi, et pour empêcher la propagation de cette saleté de virus qu’est le Covid-19, on doit rester chez nous. C’est aussi le moyen le plus efficace d’aider les soignant.e.s à sauver le maximum de monde. Plus de restos, plus de bars, plus de sorties entre potes, plus de famille. On bosse de la maison – si on a la chance de pouvoir le faire – au lieu de se rendre au bureau. On fait des pleins de courses avec une dose de papier toilette impressionnante chaque semaine – si on a la chance d’avoir mis la main dessus – au lieu du quotidien passage au Franprix pour deux tomates et des raviolis. Notre quotidien n’a pas grand chose à voir avec les semaines précédentes. 

Après sept jours, on devine d’ailleurs les ravages de l’enfermement sur certain.e.s. L’indice de pétage de plomb se calcule en fonction du nombre de filtres inutiles ou de challenges auxquels cette personne participe en story. En nous taguant, inévitablement. “Me voici à 5 ans, je nomine machin, truc et muche”, “Une photo de moi enceinte, je vous mets au défi de faire de même, hihi”. Des jeux en apparence inoffensifs, mais qui peuvent vite glisser sur une pente dangereuse, type : “Ma tête au collège, à votre tour de montrer la vôtre xoxo”. Et nous forcer à dévoiler un look approximatif concocté chez Jennyfer circa 2004 qu’on aimerait oublier à jamais. Prudence, donc.

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Alors je ne sais pas vous, mais personnellement, je n’ai pas encore eu de frayeur claustrophobe. Et ça ne m’étonne qu’à moitié ; rester chez moi, c’est ma passion. Les messages que je préfère recevoir sont – à de rares exceptions près – ceux qui me préviennent qu’un dîner est annulé à la dernière minute. Je me vois déjà me noyer dans mon océan de coussins, une série sur l’ordi et un bébé sous le bras. Le rêve. Bien sûr, à l’époque, ça n’impliquait pas de crise sanitaire mondiale. C’est la toute la différence, et la raison pour laquelle je me délectais de ces moments sans gêne – que je dissocie forcément de ce qu’on vit aujourd’hui. Je sais aussi que c’est un luxe de pouvoir m’accommoder de plusieurs semaines à ne pas pouvoir sortir, sans pour autant perdre mon boulot ni être dans l’incapacité d’exercer mon droit de retrait, que ce soit clair. Mais toujours est-il que cet amour pour la glande à l’intérieur me permet de vivre la situation plus sereinement.

Le vrai visage du télétravail

Les mots qui suivent vont sonner le glas de la logique : cette première semaine a été vécue non sans liberté. Oui bon, je m’explique. Il fallait apparemment qu’on mette de côté celle du mouvement pour en gagner d’autres. Et s’affranchir de quelques carcans. Le soutien-gorge déjà. Ai-je porté cet instrument de torture une seule fois dans les sept jours qui viennent de passer ? Négatif. Et à en croire Pénélope Bagieu, soutenue par environ 14 000 internautes, je ne suis pas la seule. Il paraît qu’elle remonte quand on cesse d’enfermer sa poitrine dans du tissu et du métal. Je compte donc avoir les seins d’Emily Rata en sortant de confinement, en 2021.

Les fringues, ensuite. Oui d’accord, pigiste depuis trois ans à quelques mois près, je devrais continuer de mentir comme tous.te.s celles et ceux qui se sont empressé.e.s de donner leurs conseils aux nouveaux télétravailleurs : « Surtout, préparez-vous le matin comme si vous partiez au bureau ». Lol.  Qu’on me cite une personne qui bosse de chez elle sans obligation de sortir de la journée, et qui ne prend pas sa douche à 17 heures une fois sur deux. Le BUT de travailler à la maison (et je l’écris en majuscules) est justement de pouvoir le faire de son canapé, de son lit, de sa cuisine, la main dans le paquet de Country Crisps au chocolat noir. Et de ne pas avoir à quitter son pyjama ample autrement que pour aller s’acheter un avocat entre midi et deux – et encore, on enfile juste des tongs. En plein confinement, autant vous dire que je pousse le vice jusqu’à ne pas me changer du tout, tirant un trait radical sur les vêtements moulants. Là je suis au lit, il est 21h17, et j’ai passé la journée dans le legging de la veille, que je porte encore présentement. Dégueu ? Mais non. Simplement écolo. Vous n’imaginez pas le nombre de lessives que j’économise (je me lave quand même hein).

Autre fait libérateur : l’absence totale de maquillage. Moi qui ai l’habitude de crier haut et fort que “je me maquille uniquement pour moi !”, je vais devoir revoir mes principes. J’ose le formuler : mardi 24 mars, je ne sais plus comment utiliser de mascara. Le blush me semble un objet d’antiquité, et mes cernes un détail pas si vilain de ma mine aussi pâlotte que les murs de mon appartement, privé de lumière mais pas de vis-à-vis (salut, au passage, voisin qui pense que ta fenêtre de salle de bain est opaque). Tout ça pour dire que se promener avec l’allure qu’on veut a aussi sa part de luxe. Luxe qu’on se (nous) refuse parfois, à grand coup de “soyez présentable”. Je ne reviendrai pas sur le fait qu’un mec n’a ni à cacher ses “imperfections” faciales, ni à emprisonner ses pectoraux pour être pris au sérieux, mais je suis à deux doigts. Finalement, s’il y a une opportunité que nous permet de saisir ce confinement, c’est celle de se défaire d’injonctions vestimentaires, et de libérer son corps. Alors tâchons de ne pas y renoncer quand les choses auront repris leur cours normal, on l’espère très vite.

Article de Pauline Machado

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