GUILLERMO GUIZ A UN BON FOND
Guy Verstraeten, plus communément appelé Guillermo Guiz,
sera un personnage incontournable de l’humour francophone en 2018. Paulette le parie.Que ce soit dans ses chroniques cash sur France Inter, dans sa drôle de série sur Canal + ou dans son spectacle doux-amer au Point Virgule, celui qui a endossé le maillot n°10 quand il était un jeune espoir du foot belge, fait de lui-même un cas d’étude. Il raconte avec moult adverbes son parcours atypique et alcoolisé, constitué de plusieurs métiers-passions, de beaucoup de sexe et de nombreuses questions existentielles. Une chose est sûre : Guillermo Guiz n’a pas démérité.
J’ai démarré la scène, parce que cela faisait quelque temps que cela me trottait dans la tête, après avoir vu pas mal de stand up américain. Je me suis lancé et c’est devenu mon métier actuel. Bon, il y a aussi une rupture qui m’a fait oser monter sur scène. Je me suis dit que la souffrance que je vivais pouvait être effacée par le trac. Mais au début, j’avais à la fois de la souffrance et du trac, ce qui était assez difficile à gérer. (rires)
Je pense que je vais vieillir d’un coup. Je bluffe encore pas mal les gens avec mon âge. C’est con, j’aurais du venir en France en disant que j’avais 28 ans, personne n’aurait vérifié, je n’ai pas de Wikipédia. Et quand bien même, j’aurais mis une fausse date de naissance. Ici, Monsieur Poulpe, Yacine Belhousse, Kyan Khojandi donnent l’impression d’avoir toujours été dans la place. On a le même âge, mais vu que je suis arrivé tard dans le game, je suis considéré le petit nouveau!
Mon spectacle “Guillermo Guiz a un bon fond” n’est pas “spectaculaire”. Il n’y a pas d’effet, je ne cherche pas ça. Je ne me vois pas le mettre à 40€ ; il n’y a pas assez d’effets spéciaux. (rires) Concernant le texte, il a énormément bougé depuis que j’ai lancé le spectacle il y a 2 ans et demi. 80% du texte a changé, mais ça s’est fait progressivement. J’ai besoin d’enlever des trucs, d’injecter du sang neuf, mais je garde toujours le fil rouge du “bon fond” pour donner vie à mes anecdotes. Depuis quelques mois, j’ai trouvé une formule qui me plaît bien.
Qu’as-tu piqué aux humoristes américains ?
La philosophie générale, l’attitude, la désinvolture sur scène. Je n’ai jamais piqué de vannes, en tout cas pas consciemment. Parfois, je me rends compte qu’il y a des vannes que je digère et que je ressors 2 ans plus tard en pensant que c’est entièrement de moi, sauf que non. Ca m’est arrivé de m’en rendre compte et de l’effacer immédiatement. J’ai peur de ça, c’est pour cela que je ne vais pas voir de spectacles des collègues, sauf si je suis obligé. Je les aime beaucoup, mais c’est risqué. J’essaie de suivre mon sillon.
Les moments d’inspirations sont des moments d’euphorie. Je peux être déprimé et avoir envie de crever, puis trouver une idée qui me plaît et soudain le monde s’illumine à nouveau. Mais je ne peux pas être tributaire de mon inspiration. La réalité de 2017 est telle que l’on est obligé d’être drôle sur commande. C’est du boulot, je me mets devant un cahier, je prends un sujet et j’écris des vannes. Les gens essaient de trouver des sous-textes philosophico-sentimentalo-psychologisant dans ce que je fais, mais j’écris juste des blagues. Je vais voir une news et essayer de prendre un angle qui va déclencher un rire. Ce n’est pas plus noble que ça.
Es-tu timide?
Je bois un café, je me brosse les dents, je parle avec un Bic en bouche pour que l’on comprenne ce que je raconte, vu que j’ai une élocution pas dingue. Je mets du beurre de cacao sur les lèvres et j’enclenche l’enregistreur de mon téléphone. Et je monte sur scène. Tous les soirs.
Je me rebrosse les dents et je me nettoie pour ne pas trop puer. Puis, je sors du Point Virgule et je fais des selfies avec les 100 personnes qui m’attendent. Ou alors je prends le métro parce que personne ne m’attend. On va dire que c’est plus ça, la réalité. (rires)
J’essaie le plus souvent possible de me rappeler que dans 50 ans, ce sera comme si tout cela n’avait jamais existé. Quand je fais une chronique et que je ne suis pas content de moi, je me demande : “Qui va se rappeler de mon texte dans 2 semaines ?” On n’est pas très important, et on ferait mieux d’en avoir rien à branler.
Si tu étais un animal, que serais-tu ?
Qu’est-ce que tu aimes chez toi ?
Est-ce que le mulet est ta pire faute de goût ?
Non. Ma vie est globalement une faute de goût. (rires) Quand j’ai eu bon goût niveau fringues, c’était soit par accident soit parce que des meufs m’avaient offert des trucs cool ou m’avaient dit “Ne mets pas cette veste en daim ! Oublie ce t-shirt avec un dragon dessus !”. Si tu veux savoir ce qui était à la mode il y a 3 ans, regarde comment je suis habillé aujourd’hui.
“On est complètement sur une base de…”, mais elle s’est généralisée, du coup, je l’entends partout. J’essaie de m’en déshabituer et de garder ma singularité, mais ce n’est pas facile dans un monde où tout le monde me copie. (rires)
“Mon chien stupide”, de John Fante. Il est fantastique. Je rogne sur mon temps de réseaux sociaux pour essayer de lire dès que je peux. C’est un de mes grands projets de vie.
Angèle.
Le lieu de vacances idéal pour décompresser ?
L’hôtel du temps, sans conteste. Leur muesli est mon plus grand bonheur dans la vie en ce moment. Je ne devrais pas le dire, c’est un endroit assez secret. J’y suis tous les jours, seul avec le réceptionniste. Et aussi le Titty Twister. A Bruxelles, j’aime aller dîner tard à la Mirabelle après mes spectacles puis au Bloody Louis.
J’aimerais bien faire un truc que je n’ai pas encore fait. Peut-être écrire un scénario de long métrage drôle, mais je ne suis pas certain d’en être capable.
Retrouvez Guillermo Guiz au Point Virgule à Paris, du jeudi au samedi jusqu’à fin juin, sur Canal + dans le Roi de la Vanne tous les samedis, ainsi que sur France Inter dans l’émission de Nagui « La Bande Originale » tous les jeudis.
> Propos recueillis par Séphora Talmud