CHARLOTTE OC : POP ELECTRO GOTHIQUE


Photos : Elodie Daguin

On la présente déjà comme la nouvelle Lana Del Rey. Mais avec son premier album « Careless People », Charlotte OC compte bien faire la différence. Il est question d’amour, filial surtout, et des comportements toxiques qui peuvent blesser le cercle familial. Portrait d’une artiste nostalgique et romantique à la personnalité bigarrée.

Son entourage professionnel nous la présente comme une belle plante avec une super voix ! Mais ce serait trop réducteur de la définir ainsi. Car Charlotte OC n’a que faire de son apparence physique. Sur scène, elle préfère cacher sa silhouette sous de longues robes noires de déesse à la Kate Bush, et dans la vie, cultive un bagout dont elle a le secret. La belle est loin de minauder sous le feu des projecteurs. « Je n’ai pas envie d’être jolie ou de pavaner. Je veux proposer quelque chose de brut, d’intense et d’authentique. Etre dans l’émotion tout simplement. S’il y avait un message à faire passer, ce serait celui-là ! » La jeune artiste de 27 ans n’est pas dans une posture sexuée comme souvent dans la pop sous influences rnb. Elle ne met le fait d’être une femme en avant. « Il y a une androgynie dans ce que je fais. Mais je ne peux pas nier qu’il y a aussi une dimension sexuelle dans la musique. J’essaie de m’amuser avec ça et de le faire avec classe. Sans avoir à montrer mes seins ! »

C’est le point de rencontre de nombreuses artistes aujourd’hui. On citera notamment Alicia Keys, sa première idole. « C’est ma chanteuse préférée. La première fois que j’ai chanté devant des gens, c’était un de ses titres, pour une compétition organisée dans mon école qui s’appelait « Divas ». Je portais des tresses africaines et j’essayais de reproduire sa gestuelle, j’avais tellement le trac ! » Plus tard, elle est allée la voir en concert à l’Apollo de Manchester. C’est un nouveau coup de cœur qui lui indique la voie à suivre. « Il n’y a rien de sexuel dans sa façon de se mouvoir sur scène. Tu regardes juste une artiste incroyable derrière son piano qui n’a pas besoin d’en faire trop. Ça devrait être un modèle pour toutes les jeunes filles. Ça l’était pour moi. » Un poil moralisateur mais on comprend l’idée. Parmi ses icônes du style, on trouve PJ Harvey ou Grace Jones, mais aussi Aretha Franklin, des femmes de style qui en ont sous le capot. Charlotte OC cultive une personnalité double, pas « preppy » mais « dark », inspirée de l’imagerie des films d’Hitchcock et de la série « Twin Peaks ».

> Cœur brisé et magie noire

« Careless People », son premier album, s’ouvre sur « Let the love begin » (« Laissez l’amour vous envahir »). Une soif d’amour en forme de quête spirituelle. « Avec cet album, je suis devenue une femme », relativise-t-elle. Pour la petite histoire, Charlotte OC a été cueillie par une maison de disques alors qu’elle n’avait que 16 ans et aucune expérience de la vie. Repérée via MySpace, elle a enregistré ses premiers morceaux avec un cassette-recorder 12-pistes que lui avait offert son papa, musicien, membre de The Merseybeats dans les années 60. « Il ne m’a pas appris à jouer de la guitare. Il a fait mieux que ça, il m’a forcé ! J’étais carrément accro aux chewing-gums quand j’étais jeune. Alors pour contrôler ma consommation, il avait pris l’habitude de m’accompagner à l’épicerie en voiture. Un jour, alors que je trépignais d’impatience à l’idée de goûter de nouveaux parfums, il m’a offert mon premier cours de guitare ! J’étais mortifiée (rires). » Elle décroche un contrat discographique avec Columbia sauf que l’album ne sortira jamais. « Je ne l’ai pas ressenti comme un échec. Avec le recul, je sais que je n’étais pas prête. Dieu merci, ils l’ont compris avant moi ! »

Charlotte comprend qu’elle doit se faire violence et multiplier les expériences pour en parler avec justesse. Elle fantasme les rapports humains en surprenant les conversations des clients du salon de coiffure tenu par sa maman puis abandonne ses études pour s’installer deux ans à Berlin avec ce besoin irrésistible de vivre. « C’est la première fois que je partais seule, sans mes parents. Je me suis sentie vivante ! » Charlotte choisit de vivre intensément et de se brûler les ailes. Elle découvre la scène techno au Berghain, club le plus select de la capitale allemande, et tombe amoureuse. Elle veut avoir le cœur brisé et brisé celui de quelqu’un à son tour. Drôle de dessein ! Comme si elle avait besoin de cet inconfort pour écrire. « C’est vrai que je l’ai provoqué et c’était horrible ! Aujourd’hui je ne cours plus après ce genre d’émotions extrêmes, je suis devenue trop sensible pour ça (rires). » L’intensité qui se dégage de ses chansons vient très clairement de son rapport schizophrénique à l’existence. Elle puise son inspiration dans les tréfonds les plus sombres de sa personnalité. Dans ses textes, les références au paradis et à l’enfer sont légion, comme dans son premier single « Darkest Hour » où elle chante sur le refrain : « le diable attend, le diable attend après toi ». On pense notamment à Bat For Lashes ou Zola Jesus pour leur singularité soul.

Une fille bizarre ? Elle le concède volontiers. « Je n’ai jamais voulu être comme tout le monde ! », nous assène-t-elle. La petite Charlotte O’Connor a grandi du côté de Blackburn en Angleterre. Elle est le fruit d’un joli métissage. Sa mère est moitié malawite-moitié indienne et son père irlandais. « J’ai grandi dans une maison dominée par les femmes. Ma mère est incroyable, elle a dirigé son business pendant 30 ans. J’ai deux sœurs, je suis la plus jeune. » Petite, elle joue les bêtes curieuses. « J’avais un ami imaginaire, une petite souris, sur qui j’avais l’habitude de rejeter la faute. » Obsédée par la série « Buffy contre les vampires » et Dracula, elle se rêve excentrique, pour masquer sans doute sa timidité. « Je faisais des danses rituelles dans le jardin pour faire peur aux voisins et j’ai même failli me tuer en essayant de faire du feu (rires). » Elle pratique même la magie noire pour imiter Sandra Bullock dans « Les Ensorceleuses ». « Je détestais ma sœur cadette quand j’étais petite. J’écrivais sur mon tableau noir dans ma chambre : je la déteste ! (Rires) Aujourd’hui, c’est ma meilleure amie ». On est à la limite du rite vaudou. Pas farouche !

CHARLOTTE OC :: Careless People (Harvest Records/Capitol)

Sortie le 31 mars 2017

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En concert le 26 avril à Paris, au Badaboum

 
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