7 artistes africain.es et afro-descendant.es qui ont marqué la première édition de Paris + par Art Basel

Un vent de nouveauté a soufflé sur Paris avec l’engouement engendré par l'édition inaugurale de Paris + par Art Basel en octobre dernier.

Peinture d'une scène de vie entre amis à l'arrière d'une voiture, coffre ouvert et conversation animée
© Marc Padeu

La grande foire d’art contemporain Art Basel, délocalisée dans la capitale française pour 4 jours de célébration et de commerce, a réuni plus de 156 galeries au Grand Palais Éphémère. Nous y étions et avons observé une tendance forte : la mise en lumière d’artistes africain·es, afro-américain·es et afro-descendant·es.

Encore dominé par un regard blanc masculin et cis, le monde de l’art contemporain réuni à deux pas de l’iconique tour Eiffel a su proposer une myriade de talents et de points de vue différents. Les 7 artistes africain·es, afro-américain·es et afro-descendant·es qui suivent ont titillé notre curiosité et séduit notre sensibilité.

Oeuvre très colorées de l'artiste Kehinde Wiley
© Kehinde Wiley
Oeuvre très colorées de l'artiste Kehinde Wiley
© Kehinde Wiley

Les icônes de Kehinde Wiley

Originaire de Los Angeles, Kehinde Wiley est une grande figure de l’art contemporain qui vit et travaille à New York. Il transcrit sa réflexion sur l’identité raciale et sexuelle dans sa peinture et crée des collisions entre histoire de l’art et culture de la rue. L’artiste héroïse (et érotise) les « invisibles » traditionnellement exclu·es des représentations du pouvoir. Connu pour ses portraits naturalistes et hyper colorés, qui mettent en scène des hommes et des femmes afro-américain·es dans des poses héroïques, Wiley a été le premier artiste noir à peindre un portrait officiel d’un président américain pour la Smithsonian National Portrait Gallery en 2018, selon la volonté de Barack Obama. Cet artiste mondialement célébré mélange dans ses œuvres références classiques et culture pop. Il prend aussi soin d’aider la nouvelle génération de jeunes artistes émergents, comme le français Alexandre Diop qui présente en ce moment l’exposition « La prochaine fois, le feu” à l’Acacias Art Center, dans le 17e arrondissement de Paris.

Un tableau d'un homme noir endormi sur des draps blancs dans une nature luxuriante
© Kudzanai Violet Hwami

L’intimité capturée par Kudzanai-Violet Hwami

S’inspirant de la diaspora africaine et de ses racines, Kudzanai-Violet compose aussi son art autour de ses expériences et de son histoire. L’artiste zimbabwéenne, ayant vécue en Afrique du Sud, questionne le genre et la représentation du corps noir ainsi que la sexualité, les questions d’identité et le rapport au corps. La sincérité de ses oeuvres est sublimée par les formats qu’elle utilise et la peinture à l’huile intensément pigmentée. « Il y a des moments dans l’histoire et dans notre époque auxquels on ne peut pas échapper et je pense que je veux me donner un moment d’évasion », déclare- t-elle.

Tableau de Peter Uka représentant une scène de danse
© Peter Uka
Tableau de Peter Uka représentant une femme noire vêtue de blanc assise sur un fauteuil vert
© Peter Uka

Les souvenirs de Peter Uka

Ce Nigérian installé à Cologne peint ses tableaux inspirés des souvenirs du Nigéria de son enfance. Bénéficiant d’une formation classique en figuration réaliste, il capture les tendances internationales de la fin du XXe siècle et l’influence de la mondialisation qui lie les pays du monde entier, rappelant ainsi au public qu’il existe une réciprocité et une proximité entre tous·tes les citoyen·nes de la planète. Les scènes de vie de son enfance — à savoir les coiffures afro et les jeans pattes d’éléphant, les mimiques optimistes et les coutumes locales — sont toutes restituées dans d’éclatantes narrations visuelles. Détail pas si anodin : Peter Uka est représenté par Mariane Ibrahim, franco-somalienne dont la galerie éponyme fondée il y a dix ans est basée à Chicago et met en lumière l’art contemporain de la diaspora africaine depuis ses débuts.

Tableau de Romeo Mivekannin représentant un homme noir dans un tenue d'officier oriental
© Romeo Mivekannin
Représentation orientaliste d'un homme noir par l'artiste Romeo-Mivekannin3
© Romeo Mivekannin

Les portraits de Roméo Mivekannin

Originaire de la Côte d’Ivoire, Roméo Mivekannin vit et travaille entre Toulouse et Cotonou au Bénin. Maniant l’invisible et le caché, il cherche autant à conjurer les rapports de domination qui perdurent dans nos représentations collectives qu’à se réapproprier certaines mémoires volées. À travers l’iconographie, il passe du regard subi en tant qu’objet au regard choisi. Ses peintures sur toile libre sont inspirées de peintures orientalistes (courant artistique né en Europe au XIXe siècle) et sont l’exemple des stéréotypes construits par un regard blanc et occidental, entre mépris, fantasme et fascination. L’esthétique des toiles présentées en dit beaucoup de l’essentialisme orientaliste, avec la gourmandise des couleurs, l’érotisme, le maniérisme des costumes et le luxe fantasmé des décors. Roméo Mivekannin reprend ces mêmes codes en y ajoutant, au cas par cas, une forme d’ironie venant en grande partie de sa pratique de l’autoportrait. Représenté à Paris + par Art Basel par Cécile Fakhoury, galeriste franco-ivoirienne installée en Côte d’Ivoire qui oeuvre à la promotion de l’art contemporain africain, le travail de Roméo Mivekannin ne laisse personne indifférent.

Portrait d'une femme noire vêtue de bleu par Ludovic Nkoth
© Ludovic Nkoth
Deux personnes noires s'enlacent par Ludovic Nkoth
© Ludovic Nkoth
Tableau représentant un bateau de migrants africain.es en plein naufrage en pleine mer de l'artiste Ludovic Nkoth
© Ludovic Nkoth

La mélancolie de Ludovic Nkoth

Avec ses coups de pinceau tourbillonnants et sinueux, Ludovic Nkoth aborde le thème de la migration transatlantique, une réflexion directe sur l’histoire de la diaspora noire africaine et sur sa propre expatriation aux États-Unis à l’âge de 13 ans. Habitant et travaillant depuis plusieurs années à New York, Ludovic Nkoth allie des motifs esthétiques camerounais et des couleurs vives à une allégorie post-coloniale, tout en explorant la formation et la fragmentation de l’identité. Ses rêves lui servent d’inspiration pour peindre des tableaux comme des cartes postales illustrant des souvenirs, des rêves à l’aquarelle. Et, North de préciser : « Mon travail tente de récupérer les choses qui ont été enlevées à mon peuple. Des choses comme le pouvoir, la culture, l’autodétermination et l’idée d’être noir·e et fièr·e. ».

Tableau représentant deux enfants à dos de crocodile
© Hilary Balu
Tableau représentant un homme assoupi à dos de lama
© Hilary Balu
Tableau représentant 3 personnages dont 2 portant des casques de moto
© Hilary Balu

Le voyage épique d’Hilary Balu

La ville de Kinshasa (en République Démocratique du Congo), où il est né, vit et travaille, marque le point de départ de l’odyssée d’Hilary Balu à travers l’Afrique. Les peintures de l’artiste présent à Paris + par Art Basel sur le stand de la galerie Magnin-A dévoilent une société africaine transformée par la mondialisation et la société de consommation. La « mutation brutale » qu’a connue la République Démocratique du Congo dans son identité culturelle, politique, économique et spirituelle est représentée à travers une symbolique de l’objet. Ses séries sont une traversée aussi bien spatiale que temporelle, du XVe siècle à nos jours, du capitalisme européen à l’esclavage, des rêves et chimères implantés dans l’esprit d’un enfant, à l’admiration des rois kongo devant les objets importés par les Portugais. En 2021, Hilary Balu a participé à Black Rock Sénégal, une résidence d’artistes fondée par Kehinde Wiley.

Famille attablée et partageant un moment convivial
© Marc Padeu

La nostalgie de Marc Padeu

Le travail de l’artiste camerounais questionne la mémoire du passé et le rapport au spirituel dans les sociétés africaines actuelles. Ses œuvres m’ont interpellé car l’expression de l’amour et de l’affection se ressent. En utilisant certains arrangements, il nous remémore ‘Le déjeuner sur l’herbe’ de Manet. Les compositions de Padeu font souvent référence aux peintures des « maitres » et pointent aussi du doigt la société de consommation, la mondialisation, la fétichisation des marques et le commerce.

Article de Josué JFJ

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