Victor Weinsanto, l’avenir de la mode engagée

Il a 29 ans, de l’or au bout des doigts et une énergie débordante. Victor Weinsanto, fondateur et directeur artistique de sa marque éponyme, a su faire ses preuves en seulement 3 ans.

Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre

Né à Souffelweyersheim près de Strasbourg, il se passionne pour la danse classique dès l’âge de 4 ans et intègre une école prestigieuse de Stuttgart à 13 ans. Réalisant cependant que cette rigueur et ce manque de liberté ne lui correspondent pas, le jeune Victor Weinsanto occupe son temps libre à analyser les défilés de mode. A l’aube de ses 18 ans il est déterminé à changer de vocation. C’est ainsi qu’il se retrouve à l’Atelier Chardon Savard, et fait ses débuts auprès du couturier Jean-Paul Gaultier.

À la conquête de Paris

Alors que « l’Enfant terrible » de la mode présente son dernier défilé en janvier 2020, Victor Weinsanto, lui, est décidé à lancer sa marque. Il quitte la maison de couture et présente en mars son premier show « Connes-sur-Mer » une semaine avant le confinement. Cette première présentation fait écho au travail de JPG qui mêle spectacle et mode lors de ses défilés. Weinsanto dévoile des tenues à la fois punk et hautes en couleurs. Ses modèles balaient d’un revers de main l’attitude adoptée lors d’un show classique et dansent tout en assumant leur sourire. Iels nous invitent à cette folle soirée où tout est permis. Le designer est ainsi repéré par Adrien Joffre, le PDG de Comme des Garçons qui décide de soutenir la marque notamment en lui proposant un showroom dans la capitale.

Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
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Éveiller les consciences

Se confiant à la Fédération de la Haute Couture et de la Mode, il reconnaît être arrivé dans l’industrie au bon moment. Selon lui, le public avait besoin de sortir de sa morosité après la période Covid et surtout de s’ouvrir à davantage de créativité. Il a muri toute une réflexion autour du message que doit porter un jeune créateur, en normalisant l’inclusivité des âges, des corps, des genres et des ethnies ainsi qu’en tenant compte des problématiques environnementales. Pour sa marque, il a fait le choix de s’associer à Nona Source, une plateforme en ligne de revente de tissus. Aussi appelées « dead stocks », il s’agit de matières abandonnées par les maisons de mode à cause de leurs défauts. Une stratégie astucieuse car elle permet d’accéder à des tissus de grande qualité à un prix abordable.

La culture fait son show

En 2021, Weinsanto se retrouve sur le devant de la scène avec la série Emily in Paris où l’actrice Philippine Leroy-Beaulieu crève l’écran avec une robe de la collection hivernale. Le directeur artistique l’invitera à clôturer son défilé « Murder in Paris » en 2022. La marque touche aussi le monde des drag queens. Ses créations sont portées dans l’émission Drag Race France par la candidate La Grande Dame et la gagnante Paloma. Les deux égéries participeront au défilé printemps-été 2023 « Common Love » aux côtés du designer Charles de Vilmorin. Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, le succès s’étend à l’international lorsque Madonna et Rita Ora s’affichent elles aussi en Weinsanto.

Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre

Emprunte d’espièglerie, la marque propose des défilés qui se démarquent avec des scénographies atypiques qui contrastent avec un décor désaffecté. Tout réside dans le détail, le designer se calque sur la personnalité du modèle pour lui attribuer sa tenue. Il nous offre une orde de créatures qui ont un rôle comme dans une pièce de théâtre; elles expriment leur personnalités et font vivre le vêtement. Dans les backstages de ses shows, il offre sa chance aux étudiant·es en école de mode pour faire office de petites mains. Une occasion unique de partager leur sens créatif commun. Jusqu’à la dernière minute, des pièces sont échangées voire utilisées d’une manière totalement imprévue. L’effervescence créative ne s’arrête jamais.

Victor Weinsanto a aussi le sens de la démesure, des pièces XXL aux coiffes grandioses, en passant par des silhouettes ligotées par des tresses. Il n’en oublie pas pour autant son héritage alsacien auquel il rend hommage avec le show « Hopla Geiss ». Collection où il modernise le tissu kelsch version rose et fait dévorer un kougelhopf dérobé dans un sac à son mannequin.

Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre
Weinsanto FW23/24 ©Dominique Maitre

Élargir son horizon

Après l’ouverture de la dernière semaine de la mode à Paris, le créateur a présenté sa collection à Dubaï lors de l’Arab Fashion Week. Une belle opportunité de se faire connaître à l’étranger, couronnée par le magazine Forbes qui l’a nommé parmi les 30 personnalités de moins de 30 ans qui créent le futur de la mode et de l’art en Europe. Cerise sur le gâteau, la chanteuse star Beyoncé a choisi l’un de ses looks les plus avant-gardistes pour sa tournée mondiale « Renaissance World Tour ». Ce moment où la Reine des abeilles, ou « Queen Bee », se laisse enveloppée dans des draps Weinsanto a fait le tour de la toile.

Désormais, le jeune créatif n’a plus grand chose à prouver, tant sa force réside dans la représentation de toutes les identités qui l’entourent. Ses projets sont un enrichissement à la culture française et une réponse aux attentes de la jeune génération. Collection après collection, il réussit son pari, à savoir celui de s’amuser avec les vêtements tout en suscitant des réactions.

Article d’Esther Druel

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