THE SOUL OF SEOUL

Par Tram-Anh Tran et Claire Bihoreau

La Corée du Sud, ou le « Pays du matin calme », n’est calme qu’en apparence, surtout à cause de sa capitale ! Séoul est une ville en perpétuel développement où ses airs futuristes côtoient un patrimoine mondial culturel riche et ancestral. Moins populaire que sa voisine Tokyo, Séoul est pourtant l’une des villes les plus peuplées au monde avec 10,5 millions d’habitants hors banlieue. Le pays vit principalement du tourisme et de son pôle électronique et automobile, avec ses leaders mondiaux Samsung, LG ou Hyundai. Il est également reconnu pour s’être reconstruit rapidement après la guerre de Corée (1950-1953) – à la fin de laquelle le territoire sera divisé en deux pays distincts –, grâce à un investissement considérable dans l’éducation. Situé entre le Japon et la Chine, vous y découvrirez un contraste saisissant entre palais royaux, maisons traditionnelles, architecture futuriste, marchés de nuit et rues bouillonnantes. C’est une destination faite pour tous les voyageurs : amoureux de randonnées, gastronomes curieux, pour ceux qui ne dorment pas, mais aussi ceux qui se lèvent tôt. Et malgré les tensions régulières avec le Nord, la Corée du Sud reste un pays très sûr !

© Lucie Bihoreau

INFOS PRATIQUES

COMMENT S’Y RENDRE ? En avion sans escale, avec Air France, prévoir 11 heures depuis Paris. 650 euros en basse saison, 950 euros en haute saison !

QUAND Y ALLER ? D’octobre à novembre pour profiter d’un été indien sans grisaille et admirer les couleurs de l’automne ; de mai à juin pour les cerisiers en fleurs et les températures qui remontent doucement après un hiver rude.

COMMENT SE DÉPLACER ? Avec ses neuf lignes de métro et ses six lignes de train, Séoul est extrêmement bien desservie. En taxi, les tarifs sont abordables (suivez attentivement le compteur qui commence généralement à 3 500 won, environ 3 euros). Pour voyager dans le pays, préférez l’avion pour vous rendre à Jeju et à Busan ; le bus pour les autres petites villes.

OÙ DORMIR ? Séoul est une ville immense : privilégiez des quartiers centraux comme Hongik si vous souhaitez séjourner dans un quartier animé. Pour une expérience authentique, posez vos valises dans une guesthouse traditionnelle (les maisons hanok) dans le quartier de Jongno.

QUE RAPPORTER ? Du ginseng, pour ses vertus médicinales, acheté au Gyeongdeong market (ne pas hésiter à négocier les prix si vous achetez en quantité), des cosmétiques sud-coréens (Tony Moly, Innisfree, Etude House…), de l’Ossuloc Tea, de l’île de Jeju.

DÉCALAGE HORAIRE : + 8 heures en hiver ; + 7 heures en été.

© Lucie Bihoreau

Je m’appelle Tram-Anh, et pour la première fois de mon existence, je choisis de vivre l’expérience d’une vie : partir étudier un an à l’étranger. C’est avec un mélange d’appréhension et d’excitation que je m’aventure sur un continent inconnu, l’Asie. Après onze heures d’avion en solitaire, j’arrive dans l’immense aéroport d’Incheon. La chaleur humide me happe dès la sortie de l’avion. J’ai l’impression d’étouffer. Un peu déboussolée, je reconnais vaguement MJ, ma buddysud-coréenne qui me guide vers un bus pour rejoindre directement la EWHA Womans University – ewha signifie « poiriers en fleurs » en coréen – dont l’incroyable architecture me rappelle la BNF, car dessinée par le français Dominique Perrault. 

La rencontre

Le premier soir, je rejoins en dix minutes à pied depuis mon université le quartier étudiant de Séoul, Hongik, après un bon barbecue coréen – composé de viandes de porc et de bœuf marinées à griller – à Sinchon. Dans le fameux Hongdae Playground, une aire de jeu connue pour ses performances et installations artistiques, ses graffitis ou encore ses free markets, tout le monde tient à la main une bouteille de Soju, l’alcool national qui se mélange avec à peu près tout ce que vous souhaitez. Je goûte aussi pour la première fois une boisson trouble appelée makgeolli, un alcool de riz qui se boit comme du petit lait. L’ambiance est à la fête, et pourtant aucun soir ne se ressemblera. Des groupes de jeunes sud-coréens dansent et maîtrisent à la perfection le hip-hop, chantent dans les rues, et possèdent visiblement de multiples talents. Dans la foule grouillante nocturne, je parviens à rejoindre mon ami Victor qui a fait la connaissance la veille de Claire, une étudiante française de son université de Sogang. C’est le début d’une longue amitié. Nous ne le savons pas encore, mais toutes les deux, nous allons parcourir une grande partie de la Corée du Sud ensemble – et même entreprendre d’autres voyages ailleurs en Asie et en Europe. À travers ce carnet de voyage écrit à quatre mains, nous espérons vous faire partager notre goût commun pour la culture, l’art, les bonnes adresses et les jolies rencontres faites sur la route…

Aux portes de la nature

Les premiers jours, nous prenons un peu de hauteur en allant explorer le parc national de Bukhansan. Nous faisons la rencontre de M. Chang, notre guide local. Sa forme physique nous impressionne pour son âge avancé : il nous explique que la Corée est l’un des pays les plus montagneux au monde, et la randonnée, l’un des passetemps favoris des séniors. Nous commençons alors une aventure en compagnie de plusieurs locaux qui nous guident vers le point culminant du parc, Baegundae, situé à 836 mètres de haut. Arrivées au sommet, la vue immense à 360 degrés de Séoul est à couper le souffle. Si vous avez moins de temps ou si vous n’êtes pas un.e grand.e sportif.ve, préférez la Ansan Mountain, accessible depuis le campus de Yonsei University, en plein coeur de Séoul.

Papilles en éveil

La gastronomie locale ne manque ni de saveurs ni de surprises ! Il serait impossible de visiter la Corée du Sud sans expérimenter tous ses mets et boissons emblématiques. Sachez que tous les plats coréens sont accompagnés de kimchi et de radis jaune. Je n’ai jamais vu un Sud-Coréen commencer son repas sans un peu de side, au même titre que le pain que nous mangeons à chaque repas en France. Pour commencer en douceur votre voyage culinaire, dégustez un Bibimbap – un plat composé de riz, boeuf, légumes sautés et pâte de piment, le tout mélangé dans un bol en pierre – ou partagez un barbecue coréen dans l’un des petits restaurants de Sangsu, un quartier plus calme caché derrière Hongdae. Allez chez Dojuck les yeux fermés pour une expérience conviviale qui vous permettra peut-être de faire connaissance avec des locaux. Ou rendez-vous dans le quartier de Ikseon-dong, encore assez méconnu des touristes, pour dîner dans un restaurant traditionnel hanok. Pour découvrir une variété de street food, partez dans les rues de Myeongdong pour goûter une Gyeran-Bbang, la brioche à la vapeur surmontée d’un œuf, une tornado potato, ou encore les Mandu, des raviolis farcis à la vapeur. Pour les becs sucrés, dégustez les Hotteok, des pancakes chauds à la cannelle. 

En matière de food, nos amis sud-coréens aiment souvent nous laisser la surprise de la destination. L’une des expériences culinaires les plus marquantes reste notre déjeuner au Noryangjin Fish Market – le plus grand marché de fruits de mer de Séoul – où nos amis nous ont annoncé que nous allions goûter du poulpe vivant, le Sannakji. En réalité, le poulpe était bien mort, mais ses petits tentacules gigotaient encore dans l’assiette, à cause des nerfs. Le poissonnier prépare et coupe le poulpe devant nos yeux ahuris. Nous commandons une bouteille de Soju et de la bière pour nous donner du courage et nous surpasser. Nous sentons les petits tentacules s’agiter dans nos bouches, mais nous avalons rapidement sans trop réfléchir. Frissons garantis !

Entre tradition et modernité

La vie à Séoul s’apparente parfois à Retour vers le futur de par sa modernité et son environnement 100 % connecté. Une ville en pleine effervescence où tout va très vite de jour comme de nuit. « Pali pali ! » comme le répètent si souvent les Sud-Coréens pour se dépêcher. Bien que très développée, Séoul réserve des lieux calmes où le temps semble s’être arrêté. Nous aimons nous promener dans le temple paisible Bongeunsa, au cœur du quartier de Gangnam – situé à 45 minutes de métro du centre, devenu incontournable grâce à la chanson Gangnam Style. On y découvre le bouddhisme et l’architecture typique des temples coréens, ornés de couleurs très vives. Vous pouvez d’ailleurs grimper derrière le Grand Bouddha pour mieux comprendre ce contraste. Si vous disposez de plus de temps durant votre voyage, retirez-vous quelques jours dans un temple avec des moines bouddhistes pour vivre une véritable expérience spirituelle : le temple stay.

Le printemps arrive après un hiver glacial à -11 °C et nous en profitons pour effectuer une balade le long de la rivière Cheongyecheon, au départ de la Cheonggye Plaza dans le quartier de Gwanghwamun. Un moment reposant en plein milieu de l’un des quartiers les plus fréquentés de la capitale ! Poursuivez votre escapade le long des cerisiers en fleurs pour atteindre l’un des lieux les plus charmants et emblématiques de Séoul : le Village Mural de Ihwa. Un quartier d’une grande richesse culturelle qui abrite une partie de l’histoire de la Corée du Sud. Rien que ça ! Nous nous perdons à travers les petites ruelles bordées de maisons traditionnelles, largement décorées de street art. Un village dans la ville ; une parenthèse inattendue ; un coup de cœur dans la vie effrénée des Séoulites.

Le Séoul alternatif

Séoul regorge d’un nombre important de musées, présentant à la fois un héritage culturel fort et un pouvoir avant-gardiste. Les expositions ne sont pas toujours traduites en anglais, mais le Leeum Museum of Art est un excellent compromis. Il est constitué de trois bâtiments (art contemporain, art traditionnel et éducation), dont l’un a été conçu par Jean Nouvel et abrite la vertigineuse et intrigante Gravity Stairs d’Olafur Eliasson. 

En fin de journée, nous décidons de bifurquer sur Itaewon, le quartier indépendant, pour y découvrir la scène underground. Après avoir écumé les clubs électro gigantesques, comme l’Octagon ou l’Ellui à Gangnam (s’inscrire à l’avance et arriver avant minuit ou 1 h pour ne pas payer 30 000 won – soit 20 euros – à l’entrée), nous pénétrons dans le Beton Brut, réputé pour ses soirées techno. À quelques mètres, le Cakeshop est un petit club que nous recommandons également. À 5 h du matin, tout est encore ouvert, Séoul ne dort jamais ! Il est donc possible de terminer la soirée dans un karaoké (noraebang), de prendre un bain public dans un jimjilbang, d’éponger sa soirée avec un nouveau barbecue coréen… ou pourquoi ne pas grimper jusqu’à la Seoul Wall Fortress pour admirer le lever du soleil ?

Survivre à son premier concert de K-pop

La Korean pop est un style de musique mêlant rock, dance, hip-hop et R&B. Sa réputation est bel et bien ancrée dans la culture et dépasse les frontières. Dans les cafés, les restaurants et les rues, partout passent les mêmes refrains… Curieuses, nous décidons d’aller vivre l’expérience au plus près et d’écouter BigBang, un groupe de garçons aux allures d’adolescents – les groupes de K-pop travaillent leur apparence avec le plus grand soin, peut-être davantage que leur musique elle-même.

À peine sorties du métro, nous apercevons une foule de fans muni.es de pancartes et autres goodies, venu.es dans l’espoir d’obtenir un autographe de leur idole. Les hurlements annoncent le début du concert et nous voilà embarquées pour quelques heures au cœur de hits énergiques et de chorégraphies millimétrées, entourées de jeunes filles bien moins calmes que lorsque nous les côtoyons en cours… Nous finissons lessivées par tant d’énergie, mais avec le sentiment d’avoir été immergées pleinement dans la culture coréenne. Si vous souhaitez vivre cette folle expérience, préférez les groupes les plus connus du moment : le boys band BTS ou le girls band Blackpink.

Frénésie du shopping

À Séoul, nous sommes inondées par la publicité, et la tentation de consommer est continue. Nous sommes dix fois plus sollicitées visuellement que dans n’importe quelle ville européenne, par les dimensions, les couleurs, les constructions. Dans les petites boutiques de rues indépendantes des quartiers étudiants, vous pouvez négocier les prix des vêtements en soulignant qu’on ne vous laisse pas les essayer alors que les tailles sont uniques. Pour plus de choix et pour toutes les morphologies, filez chez Mixxo (le Zara local) ou Åland. Autre adresse un peu plus excentrée, mais qui vaut le détour pour vous éloigner du tumulte de la ville : le Common ground, un espace à ciel ouvert constitué de conteneurs bleus dans lesquels se trouvent des boutiques de vêtements de designers accessibles à toutes les bourses.

Au pays de la réussite

À Gangnam, notre malaise est grandissant. Dans les escalators, des publicités gigantesques présentant des filles identiques se succèdent. Nous avons du mal à comprendre pourquoi ces filles veulent toutes se ressembler. Nous profitons d’un groupe de travail avec des Sud- Coréennes pour leur demander si la chirurgie esthétique est monnaie courante. Une camarade nous répond : « C’est un cadeau assez commun offert par les parents, être belle est un critère de réussite. Dans mon entourage, une vingtaine de mes copines ont déjà eu recours à la chirurgie. Souvent, elles se débrident les yeux, se font redessiner la mâchoire, élever les pommettes, refaire le nez ou le menton. »

Très vite, notre regard est attiré par des concept stores, comme le Baeker Seoul, qui propose des produits uniques, avec des coins café et librairie. Un peu plus loin, nous nous rendons dans la boutique Queen Mama Market, intéressées par sa jolie sélection d’objets de décoration intérieure, ses marques pointues et son large choix de plantes. Nous poursuivons notre balade direction Garosugil, un quartier prisé avec des pop-up stores et des boutiques de créateurs. Dans les rues, nous avons du mal à circuler : non seulement Séoul est une ville dense, mais les couples sont indissociables ! Les partenaires sont littéralement collés l’un à l’autre et sont habillés de manière identique, des vêtements aux accessoires. Une façon d’exprimer leur affection.

Cette coutume peut paraître drôle, mais elle souligne surtout la pression d’une société très patriarcale. Dès leur plus jeune âge, les Sud-Coréen.nes font face à la compétition : on les envoie dans les hagwons, ces écoles privées onéreuses qui poussent les élèves à la performance afin de réussir l’examen d’entrée à l’université, passage obligé pour une carrière prometteuse. Au même titre que la beauté, une carrière dans une entreprise multinationale est un but que chaque Sud-Coréen.ne tend à atteindre. Pas le choix pour être reconnu.e socialement. Et nous ressentons combien cette pression est pesante sur nos amis, qui compensent alors à coup d’excès nocturnes en tout genre… Au cours de cette année, nous nous sommes rendu compte que les mentalités peinaient encore à évoluer, malgré cette image contemporaine, en avance sur le reste du monde, que la Corée du Sud renvoie.

LES 10 INCONTOURNABLES

  1. S’aventurer dans la zone démilitarisée (DMZ) située à 45 kilomètres au nord de Séoul, à la frontière entre les deux Corées.
  2. Faire la fashion week en sortant du Design lab du Dongdaemun Design Plaza, dessiné par Zaha Hadid.
  3. Admirer les habits traditionnels coréens lors de la cérémonie de la relève de la garde, au Gwanghwamun Gate.
  4. Louer un vélo, voire un tandem, sur l’île de Yeouido pour pédaler le long de la Han river et des cerisiers en fleurs.
  5. Faire un chicken & beer avec des Sud-Coréens dans le district de Ttukseom (85 restaurants) et finir la balade nocturne au niveau de la « fontaine arc-en-ciel ».
  6. S’arrêter au mémorial de la guerre pour comprendre le conflit entre les deux Corées.
  7. Day trip : faire une journée à Nami Island, à 1 heure de Séoul : magnifique – aussi bien à l’automne qu’au printemps. Vous pouvez arriver sur l’île en tyrolienne et même nourrir les écureuils…
  8. Faire une escapade le temps d’un week-end sur l’île de Jeju ou à Busan, la deuxième plus grande ville sud-coréenne en bord de mer.
  9. Déguster un gimbap, la version coréenne du maki japonais, composé de radis jaune, de concombre et de thon et / ou de jambon.
  10. Participer au lancer de lanternes de lotus à l’occasion de l’anniversaire de Bouddha, début mai.

@tramanh.explorer

@c.uaerohib

Article du numéro 44 « Ensemble »

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